Ecoles françaises à l’étranger, que penser des mesures annoncées ?

Le point de vue de l’UFE

Le Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, M. Jean Yves Le Drian, a annoncé un certain nombre de mesures concernant le réseau des écoles françaises à l’étranger à l’occasion de la Conférence des ambassadeurs, le 29 août 2019.

Il confirme le rôle de l’Agence pour l’Enseignement Français à l’Etranger (AEFE), qualifiée de « colonne vertébrale de notre offre d’enseignement dans le monde », qui « disposera de 25 millions d’euros supplémentaires dès 2020 ».

 
Il annonce l’accroissement du nombre de professeurs, « avec 1000 enseignants titulaires supplémentaires détachés à l’étranger dans les prochaines années ».
 
Il indique que « le niveau de participation des familles aux frais de scolarité qui avait dû être augmenté en 2017 reviendra à son niveau de 2016 ».
 
Il confirme la volonté des pouvoirs publics de doubler le nombre d’élèves scolarisés, comme l’avait affirmé le Président de la République qui avait annoncé en 2018 sa volonté de « doubler le nombre d’élèves accueillis » dans les lycées et écoles françaises d’ici à 2030.
 
Pour ce faire, il souligne son intention de faciliter les « homologations » d’établissements partenaires, qui sont reconnus comme établissements français à l’étranger.
 
Avant de porter un jugement, il convient de savoir que les écoles et lycées français à l’étranger accueillent aujourd’hui environ un quart des enfants français d’âge scolaire dont les parents résident hors de nos frontières. Ceci signifie que les trois quarts des enfants français ne sont pas scolarisés dans le réseau des établissements français, soit par choix de leurs familles, soit pour des raisons financières compte tenu du coût particulièrement élevé de la scolarité, soit tout simplement parce qu’il n’existe aucune école française à proximité. L’incapacité des établissements à accueillir les élèves français va s’aggravant, compte tenu de l’augmentation sévère des frais de scolarité et de l’accroissement très significatif du nombre de jeunes Français à l‘étranger accompagnés d’enfants d’âge scolaire. 
 
Le résultat est que beaucoup de ces enfants ne recevront pas un enseignement français et que le lien avec la France, la langue et la culture française se trouvera affecté. 
 
L’Union des Français de l’Etranger alerte les pouvoirs publics français depuis des années sur ce phénomène.
 

Dans ce contexte, que penser des annonces du 29 août 2019 ?

Après des années de baisse (moins 14% depuis 2012), les crédits de l’AEFE vont connaitre une remontée de 25 millions d’euros. Cette bonne nouvelle sera malheureusement loin de compenser les baisses constatées depuis 8 ans.
 
De même, après des années de diminution, le nombre de professeurs détachés va remonter « dans les prochaines années ». Dont acte.
 
En ce qui concerne la participation des familles aux frais de scolarité, qui est passée de 40% à 73% entre 1990 et 2019, elle va repasser à son niveau de 2016, aux alentours de 70%. Excusez du peu !
 
L’annonce du doublement du nombre d’élèves est une bonne chose en soi, mais personne ne sait si ces nouveaux élèves seront français ou non. De deux choses l’une : si la qualité de notre enseignement demeure attractive, ce que l’on peut espérer (mais ce qui ne va pas de soi) la probabilité est que les familles françaises se trouvent évincées au profit de familles étrangères plus fortunées, capables de payer des frais de scolarité considérables. Dans l’hypothèse malheureuse où la qualité de l’enseignement laisserait à désirer, les familles françaises pourront sans doute plus facilement accéder à un enseignement … dévalué. Maigre consolation.
 
Perspectives inquiétantes, qui ne sont pas apaisées par la moindre annonce en ce qui concerne la politique des bourses scolaires. Celles-ci sont toujours réservées aux familles les plus démunies, laissant les classes moyennes se débrouiller toutes seules. Or dans certains pays d’Asie et d’Amérique du Nord, il faut avoir de gros revenus pour payer les frais de scolarité. 
 
L’extension de l’homologation, donc des établissements partenaires est une bonne mesure, réclamée depuis longtemps par l’UFE. Il est en revanche dommage qu’aucune annonce ne soit faite en ce qui concerne la coopération éducative, qui est une autre façon d’augmenter l’offre scolaire en français. 
 
Au total, ces annonces ne sont pas négligeables et vont dans la bonne direction, mais trop peu et trop lentement. Trop peu au regard du nombre de Français qui s’installent chaque année à l’étranger ; trop lentement au regard de l’accroissement des besoins.
 
C’est très bien d’encourager les étrangers en France et les naturalisés à maitriser la langue française. Ce serait bien aussi d’aider les Français de l’étranger à élever leurs enfants dans la langue et la culture de leur pays.
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