Les Primaires américaines

Analyse d’Olivier Postel-Vinay, Directeur de la publication

Books est né d’un constat simple : le livre reste, partout dans le monde, le principal support d’expression des pensées les plus construites et les plus originales. Il permet de s’extraire de l’actualité immédiate pour mieux la comprendre.

En partant systématiquement d’essais ou de romans, Books se propose d’éclairer les sujets du jour et la condition humaine en exploitant la lumière des livres. Books s’intéresse à tout : la société, l’économie, les sciences, l’art, la littérature, l’histoire, la géopolitique… Au total Books analyse ou mentionne chaque mois plus d’une centaine de livres.
Books fait sortir le livre des pages littéraires et prouve qu’il constitue un outil à part entière dans le traitement de l’information.

Le regard de Olivier Postel-Vinay, Directeur de la publication

Avec Donald Trump en tête d’affiche, le spectacle des primaires américaines promet des records d’audience.

Ce n’est une bonne nouvelle ni pour les Démocrates ni pour les Républicains. Ce n’est pas non plus un bon signal envoyé par la première démocratie du monde. Ni un bon signe sur l’état de santé de cette démocratie. Au sein de l’élite américaine, de droite comme de gauche, de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer une accumulation de dysfonctionnements.

Le phénomène Trump est conjoncturel mais illustre des problèmes enracinés dans le temps et en passe de devenir structurels.

Francis Fukuyama en a dressé une liste dans la revue qu’il anime, The American Interest. Les mots sont durs, les constats sévères. « Constitution archaïque ». « Détérioration de l’intégrité électorale » – laquelle peut se traduire, comme en 2000, par l’élection d’un candidat ayant recueilli un demi-million de voix de moins que son concurrent. Bidouillage des circonscriptions électorales et des réglementations du droit de vote pour diminuer l’influence d’électeurs indésirables, étudiants compris. Défiance durable des trois quarts des Américains à l’égard de leur Congrès. Dispersion du pouvoir politique, entraînant une « dilution des responsabilités ». Prime aux « activistes » et aux « comportements politiques irresponsables ». Champ libre laissé aux lobbies. Polarisation absurde de la vie politique autour des deux partis, conduisant à l’ « obstruction », au « blocage décisionnel », à la « vetocratie ». Amplification du système des dépouilles (entre 4000 et 5000 changements de titulaire à chaque nouvelle administration). A quoi s’ajoutent d’autres phénomènes de fond, comme la mort ou l’agonie des « grands medias mainstream » et la forte croissance des inégalités.

Au total, conclut Fukuyama, la démocratie américaine a cessé d’être un exemple pour le monde. Et même s’il dessine des voies de réforme envisageables, le grand historien de l’« ordre politique » admet ne pas trop savoir comment elles pourraient être engagées. Tant est grande « l’inertie institutionnelle et culturelle ».

Fukuyama évoque avec discrétion l’un des traits les plus spectaculaires de l’évolution récente : le rôle désormais décisif des milliardaires dans l’élection présidentielle. Le plus marginal des candidats ne peut plus envisager de faire campagne s’il n’a pas au moins un milliardaire à ses côtés. La règle est la même à gauche et à droite. Comme le rappelle la journaliste Elizabeth Drew dans la New York Review of Books, Hillary Clinton en compte au moins quatre : Alice Walton, Marc Benioff, Jeffrey Katzenberg et Haïm Saban. Ce dernier, un magnat de Hollywood, est un défenseur de la droite israélienne, comme la plupart des milliardaires qui soutiennent les candidats républicains, aux premiers rangs desquels Sheldon Adelson. Donald Trump, lui, se flatte de ne pas avoir besoin l’appui de milliardaires, puisqu’il en est un. Certes, les très riches ont toujours joué un rôle dans les élections américaines, mais jamais à ce point. La raison est une série de décisions de la Cour suprême, rendues au nom du free speech. Garantie par le Deuxième Amendement, la liberté de parole est désormais comprise dans un sens des plus étendus : n’importe qui a le droit de financer n’importe quel candidat, sans limite. Le succès de Donald Trump est alimenté par la perte de confiance et d’intérêt de l’Américain moyen pour la politique au sens traditionnel du terme, observe Fukuyama.

Olivier Postel-Vinay

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